Observatoire National des Cultures Taurines

Observatoire National
des Cultures Taurines

Dominique  Valmary, a pousuivi une brillante carrière dans l’administration hospitalière qui l’a trop souvent, au cours de ses affectations successives, éloigné de sa patrie méridionale et de la corrida.
Maintenant retraité, il s’est fixé à Toulouse où il fréquente l’aficion associative militante et d’où il rayonne des arènes du Sud-Ouest à celles du Sud-Est, sans oublier l’Espagne et bientôt le Pérou.
Aficionado cultivé et savant, fin observateur, il nous livre ici une agréable analyse sociologique des bruits de l’arène qui, accompagnée de notes ajoutées par la Rédaction à l’intention de lecteurs qui ne maîtriseraient pas bien le jargon taurin, ne peut qu’éveiller la curiosité de tous ceux qui jouissent du bonheur d’en avoir.
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Dans un article paru il y a quelques mois dans le journal Le Monde et traitant des bruits excessifs perturbant le déroulement des matches de tennis professionnel le journaliste rapportait les réflexions engagées par la fédération internationale de tennis qui entend agir sur le comportement  des joueurs et joueuses. En effet les décibels ont envahi les courts et font débat depuis le cri primal d’un Raphaël Nadal, jusqu’à la tessiture suggestive de certaines joueuses telle Maria Sharapova ou encore les  débordements du public désormais habituels en particulier pour les rencontres de Coupe Davis; il est vrai que est irrémédiablement reléguée dans la phonothèque de l’histoire du sport l’image sonore de la retransmission radiophonique d’un match à Roland Garros jusqu’alors esquissée par les seuls bruits de la frappe de la balle jaune, le commentaire feutré d’un Christian Quidet, les sentences de l’arbitre et les applaudissements discrets de la foule.

A la suite de cette lecture il m’est apparu intéressant d’aborder « l’ambiance sonore de la corrida » ou plus modestement d’analyser l’éventuelle évolution des pratiques et des réalités qui lui sont spécifiques: qu’en est-il dans nos arènes où se rejoignent les comportements de ceux qui font le spectacle et célèbrent notre rite : les professionnels, la présidence, la musique et le public ?

Une constatation s’impose : le public varie dans ses réactions d’une ville taurine à l’autre, du Sud-Est plus festif au Sud-Ouest plus réservé (un auteur qualifie les arènes de Lachapaillet à Bayonne « d’arènes silencieuses » pour souligner le degré élevé d’aficion[1] d’un public qu’il entendait ainsi distinguer), selon la saison, les férias de printemps et d’automne ne réunissent pas la même population. De ces réalités rapportées mais non démontrées, il ressort qu’il y a autant d’images sonores que de lieux d’expression taurine avec toutefois des constantes qui peuvent nourrir le débat.

Deux mondes contrastés cohabitent dans l’arène :

Le monde du ruedo[2] qui se répartit sur le sable et s’agglutine dans le callejon[3] et dont les règles sont codées par les règlements taurins et les convenances du mundillo[4], d’une part ;

Le public rassemblé dans les tendidos[5] où s’installe une diversité colorée avide d’émotions, prête à les libérer sans retenue et composé aussi bien d’aficionados sûrs de leurs appréciations techniques que de spectateurs à l’expression spontanée, d’autre part.

Tout ce monde reste  motivé dans l’attente et la quête plus ou moins consciente du moment rare où l’harmonie se créera entre ce qui se produit sur la piste et les bruits générés par la foule, moment rare où s’imposera dans l’arène l’émotion que  Jean Paul Sartre définissait comme étant « la chute brusque de la conscience dans le magique ».

Bruits et sons fondés sur les sentiments ressentis et ou exprimés mais aussi bruits et sons ancillaires constituent un contraste d’un autre type que ceux qui caractérisent habituellement la fiesta brava : ombre et soleil, silence ou bronca, applausos[6] ou pitos[7]

Bruits intrinsèques liés à l’activité :

Au cérémonial de l’entrée des acteurs marqué par une certaine solennité teintée aussi du respect manifesté aux diestros[8] va succéder la mise en place du combat dès l’irruption du premier toro[9]. L’étonnement, la satisfaction ou la déception du public au regard de la présentation du bétail s’expriment immédiatement par exclamation, applaudissements ou huées et sifflets. Le premier tiers sera le temps de l’observation pendant lequel la fureur du toro pourra s’évaluer dans les gradins avec le souffle du fauve provoqué par la course violente qu’il s’impose face à la cape, avec le crissement du sable sous les sabots lors des brutaux changements de direction ou encore avec  les bruits sourds des coups de corne dans les planches et parfois les meuglements du fauve désorienté ou apeuré….

C’est ensuite l’accès du picador et de sa monture dont le jeu produira des sons caractéristiques générés par les protections de l’équipage ; le cite se fera à la voix, au geste ou par la sollicitation de la botte dans l’étrier d’où les bruits de quincaillerie toujours étonnants dans l’univers sonore plutôt cuivré de l’arène ; puis ce sera le bruit sourd de l’engagement du toro dans le caparaçon qui traduit bien la puissance de l’impact même s’il s’accompagne souvent des manifestations émotionnelles du public qui le couvrent.

Le moment de vérité est généralement souligné par un lourd silence permettant de mesurer les enjeux et le risque de blessure qui accompagnent l’engagement du matador dans le berceau des cornes ; cette émotion partagée effacera le chuintement de l’épée traçant sa voie dans la chair (bruit rapporté dans les bons ouvrages mais selon moi seulement perceptible du callejon et peut être des barreras) lui-même souvent couvert par le cri de libération et du torero et du public.

En lien aussi avec sa présence dans le ruedo, mais sans consentement de sa part, le toro sera encore la cause des sonnailles tintinnabulantes du train de mules et des claquements des fouets à l’arrastre[10] accompagnant sa sortie sous les applaudissements, le silence, marque d’indifférence, ou les sifflets adressés par procuration au mayoral et au ganadero présent ou représenté.

Bruits liés au comportement du torero

Bien entendu être chef de cuadrilla impose de coordonner le travail des péons et des picadors d’où les ordres habituels, relayés par des gestes expressifs, lancés par le torero à ses subalternes lors des différents temps de la lidia[11]. Puis le colloque singulier entretenu avec le toro connaîtra deux phases distinctes du point de vue de l’oralité de la relation : l’accueil à la cape n’est que peu souvent accompagné de mots, à l’exception du rappel du taureau échappé, ce qui s’explique aisément et sans grand risque d’erreur d’interprétation par le fougueux engagement du fauve alors que l’usage de la muleta semble ne pas se concevoir sans un accompagnement vocal d’intensité variable selon les matadors et pour certains sans incidence quant à la bravoure montrée en piste.

Mais le torero n’est pas le seul à s’exprimer au cours du combat et il est toujours intéressant de tendre l’oreille et d’observer ce qui se passe dans le callejon : informations sur le comportement de l’animal,  conseils et appréciations appuyées sont généreusement dispensés par la cuadrilla ; l’apoderado[12] y mettra du sien au regard des intérêts qu’il a à défendre et de son savoir faire s’il a été lui-même lidiador[13] et même s’il ne l’a pas été; mais ce n’est pas fini puisque parfois et selon la personnalité de celui-ci le ganadero (Ricardo Gallardo notamment) se permettra de distiller plus ou moins discrètement quelques appréciations et conseils ; n’est-il pas le mieux placé pour bien connaître ses pupilles?

Au matador de faire la part des choses entre  ordres et contre-ordres qui se confrontent pouvant créer la confusion, il y a là source de risque chez un débutant et plus encore chez certains novilleros ; il leur faudra trier le bon grain et l’ivraie pour affirmer leur propre personnalité en quelque sorte. La situation peut s’avérer si caricaturale que m’est venue l’idée de proposer pour certains l’adoption d’oreillettes…..ce serait plus discret et plus efficace que la lecture de la lidia à plusieurs voix.

Toujours de son fait il y a deux types d’instants marqués d’une profonde intimité vécus pourtant au cœur  d’une assemblée réunissant plusieurs milliers de spectateurs et qui sont difficiles à appréhender : à l’occasion de la cérémonie d’alternative ou de confirmation d’alternative et lors du brindis[14] du taureau à une personne choisie des mots sont échangés que l’on suppose pleins d’affection et non apprêtés ils sont réservés aux seuls interlocuteurs mais on aimerait en être les témoins…..

Bruits liés à la présence du public

Il n’est pas besoin de chauffeurs de salle pour entretenir l’ambiance dans l’arène, le public étant connaisseur et averti c’est très rapidement que le novice en saisira les canons et s’associera aux manifestations collectives  de la foule. Les nuances dans l’expression sont rares et les avis contradictoires ne l’empêcheront pas de prendre parti :

Etre satisfait et ce sont les ovations, applaudissements, et paradoxalement les sifflets lorsque les décisions de la présidence tardent à aller dans le sens décidé collectivement par la multitude. A ce sujet je tiens à rapporter les propos d’un président rappelant que la pétition des trophées passe par les mouchoirs agités et refusant, à juste titre,  de tenir compte des applaudissements, cris et sifflets qui ont tendance à prendre la main sur ce qui relève de la lecture du règlement. A quand l’attribution des trophées à l’applaudimètre ?

Contester et la réprobation ne manquera pas de se traduire en huées, sifflets mais aussi parfois par le silence signe de mépris. L’impatience du public dès que l’heure sera dépassée de la première minute et la demande de changement du taureau seront marquées de battements de mains rythmés.

Le public est parfois impatient, enthousiaste ou révolté il sait aussi manifester son indifférence : dans les tendidos où les abonnés sont nombreux le plaisir de se revoir année après année et le plaisir à échanger voient les discussions souvent extra-taurines prendre le pas sur l’attention qui ne se porte que d’un œil sur ce qui se passe en piste. Le brouhaha ambiant et plutôt sympathique qui s’en suit peut prendre une ampleur étonnante comme à Las Ventas lorsqu’elle traduit la réprobation silencieuse qui gagne progressivement le public lorsque l’ennui naît d’un toreo[15] sans âme, d’un toro soso [16]et aplomado[17] ou d’une faena inutilement prolongée. Toujours à Madrid l’ouverture des cabas au troisième taureau de la tarde ne se fait pas sans l’accompagnement des murmures de satisfaction de circonstance  compréhensibles si l’on apprécie la charcuterie accompagnée de vino tinto…

Dans le contexte de tension si particulier qui règne dans l’arène il est toujours étonnant et souvent déplaisant d’entendre les interpellations de forts en gueule, forts de leurs certitudes, sûrs de leurs compétences mais peu respectueux de l’interpellé que ce soit le torero ou le président avec la morgue de celui qui paye et reste en attente du retour sur investissement, l’incarnation de la vulgarité en quelque sorte.

A ce sujet sachons distinguer les harangues des orthodoxes du tendido 7 qui, à l’image d’el Rosco doté d’une voix rauque de stentor, entendent défendre l’intégrité du toro et préserver la fiesta d’une possible dégénérescence et le font savoir de façon ferme et constante face au reste du public qui, selon eux, vient aux arènes pour se distraire superficiellement.

L’expression sonore de la foule n’est pas sans effet puisqu’elle pourra infléchir le déroulement de la faena chez un torero impressionnable, comme elle pourra le déstabiliser. Par leurs réactions les hommes présents en piste montrent combien ces manifestations influencent plus ou moins directement leur comportement et je suis toujours étonné de voir un taureau s’élancer après le placement de jambe qui fait suite à l’interpellation classique du maestro de gradin enjoignant le matador d’un « cruza te mas » !

La concentration dominante est palpable à la mort et les milliers de personnes présentes vont spontanément faire silence et faire respecter le silence; il en sera de même  lors de la tension libérée à l’entrée a matar[18] ou lors des volteretas[19] ; mais cela peut ne pas durer : gare au torero qui manquera la mise à mort, gare au puntillero[20] qui par maladresse relèvera le taureau moribond ….

Mais il reste surtout ces moments rares où monte dans l’arène « le spasme du olé » cette expression viscérale lâchée par la foule envahie par l’émotion  en pleine communion avec le couple de combattants qui luttent sous ses yeux et que  Joseph Peyré a finement décrite dans son œuvre.

Une présidence privée de voix mais qui sait déchaîner les passions

Quel rôle ingrat que celui du président ! Cet homme ou cette femme, gardien du temple et garant de l’orthodoxie taurine, est réduit au silence ; il ne s’exprimera que par gestes et par l’affichage des mouchoirs dans sa relation avec les matadors du fait de la distance physique les séparant même si celle-ci est réduite par la présence sur le sable du relai opérationnel incarné par l’alguazil; il ne pourra expliquer  les décisions prises face à un  public qui n’a pas connaissance de tous les éléments pouvant les justifier. Et paradoxe là aussi ce silence soulèvera souvent une bronca ; alors je me risque à parodier José Bergamin en évoquant à son égard« la solitude sonore du président ».

La musique

Tout quidam appelé à citer quelques signes pour décrire la corrida ne manquera pas d’évoquer la musique tant elle colore cette expression artistique de tonalités ibériques chaleureuses.  Son usage, mentionné dans l’ouvrage d’Oduaga-Zolarde « les courses de taureaux expliquées » (publié en 1854 et considéré comme le premier traité en langue française) relevait d’une logique protocolaire, d’où la distinction à faire entre les clarines et les bandas. S’il convenait alors de marquer les changements detercios[21],  pratique toujours d’actualité, il n’est pas inutile de souligner combien la musique tend à s’étendre à d’autres instants de la confrontation de l’homme à l’animal.  Cette évolution connait des nuances fort différentes selon les arènes ; parmi d’autres certaines particularités sont à signaler telles les faenas sans accompagnement musical  à Madrid, l’initiative de jouer déléguée au chef de musique à Séville ou encore la tonalité viscéralement catalane à Céret.

Au-delà des règlements taurins qui ne l’évoquent pas, l’environnement musical est laissé à l’appréciation de l’empressa liée souvent par une jurisprudence solidement ancrée dans le sol ; mais tout est permis telle l’entorse au répertoire traditionnel faite à la feria des vendanges 2011 en hommage à la fameuse lidia de la chaise exécutée par Morante de la Puebla en juin de la même année : dès la prise de la muleta la peña[22]  Chicuelo II servait le concerto d’Aranjuez qui aurait été un moment émouvant si la faena avait suivi…Ceci pour dire que la musique peut être un accompagnement heureux au toreo allègre comme ce peut être aussi un four lorsque les conditions ne sont pas réunies. La corrida est bien plus qu’un spectacle et tous nous avons le souvenir d’instants où la finesse du toreo a produit par elle-même « la musique tue », « la musique pour les yeux » chère à José Bergamin ; de telles circonstances ne s’anticipent pas, ce sont les meilleurs moments.

En ce domaine tout est appréciation personnelle et subjectivité mais deux considérations devraient primer avec d’une part la nécessaire recherche de variété parmi les pièces interprétées ce qui est très loin d’être la règle ( la musique inlassablement répétée ne peut que lasser l’abonné !) sauf aux arènes du Plumaçon qui bénéficient des services d’une harmonie hors pair l’Orchestre Montois ; d’autre part et sans jeu de mot, la mesure à respecter dans le recours à cette ponctuation des gestes taurins sera d’autant plus appréciée qu’elle sera juste.

J’ose ici émettre l’hypothèse d’une évolution de l’environnement musical de la corrida partagée dernièrement avec un torero français ; comme cela se fait avec les corridas flamencas ou certaines corridas goyesques est-il impensable qu’un musicien adepte de l’improvisation ne puisse intervenir selon un registre radicalement renouvelé? En effet tout est dans l’harmonie et la coordination avec la faena[23] ce qui suppose un musicien grand connaisseur de la corrida et ayant l’initiative de ses interventions. Les festivals pourraient être les terrains d’expérimentation.

Les bruits parasites

Comme je l’évoque la corrida est faite de forts ressentis émotionnels que la littérature taurine sait magnifier avec ce vocabulaire qui lui est propre mais aussi d’actes prosaïques et ancillaires qui peuvent estomper la pureté des sentiments qu’elle suscite ; à Arles le bruit audible du palan soulevant la carcasse ou ailleurs les bruits engendrés par le moteur de l’élévateur et par la source réfrigérante du camion frigorifique ternissent le charme produit alors même qu’un autre combat est en cours. C’est aussi le valet d’épée qui entreprend de nettoyer énergiquement et pour ne pas perdre de temps les capes de brega[24] avec une brosse en chiendent alors que la lidia est toujours en cours s’attirant les foudres du public distrait dans sa dégustation de la faena en cours ; instant cocasse vécu dans le redondel[25] nîmois pourtant vaste et copieusement garni…

Pour revenir à l’ambiance sonore la musique peut elle-même être parasite lorsqu’elle intervient à contretemps, trop tôt, trop tard ou de manière inappropriée ou quand encore la sonnette transmettant la décision présidentielle est audible de l’ensemble des participants.

 La corrida est une fête populaire mais aussi un rite

Tout rassemblement de population génère son environnement sonore avec les variations liées à l’activité ; la corrida n’échappe pas à la règle d’autant plus qu’elle n’est pas qu’une fête populaire par le risque de blessure et la mort inéluctable qui planent et surtout par la ritualisation de son déroulement ; l’enjeu imprime l’ambiance de sa lourdeur et dès lors le public tendu s’exprimera  presque toujours d’une manière spontanée et viscérale qui n’est que rarement irrationnelle.

Les clarines vont ouvrir le ban en lançant le paseillo[26] et ponctuer le rythme de la lidia en traduisant les ordres du président : entrée du taureau, changement de tercio et avis ; mais curieusement la clôture de la tarde de toros n’est pas marquée par une dernière sonnerie officielle à la sortie du dernier torero (ce qui signifierait : « ite corrida est ! »). En positivant il est permis d’interpréter ce silence (en réalité applaudissements, silence ou bronca c’est selon) comme le message d’une corrida en perpétuelle continuité, un rendez-vous à une prochaine célébration …

La corrida confronte la brutalité et la violence exprimées par le taureau à l’élégance, à la finesse du torero qui l’accueille dans sa cape et s’attache à le soumettre avant la mise à mort. On attend de la part de l’homme le respect de ce registre alors même qu’il est engagé dans un combat à mort. Il est acceptable d’entendre le torero citer[27] de la voix, parler au taureau en cours de lidia, peser sur celui-ci  libérer son angoisse et ses énergies à l’instant de vérité. Il est d’autant plus regrettable d’entendre certains toreros ne toréer qu’à la voix tout au long de la faena ce qui laisse une impression  confuse contraire à l’effet attendu : la voix ne cache-t-elle pas une technique approximative ou une émotion non maitrisée ? Il est vrai que je ne goûte guère les maestros tremendistos.[28]

Comme souvent tout est affaire de tact et de mesure et lorsque l’émotion torera est là il n’y a pas besoin de musique, la magie opère…

La corrida et le sport-spectacle

Comme les autres sports l’aficion a los toros s’exprime au rythme du spectacle qui s’offre à elle mais toutefois elle s’en distingue heureusement par la non fanatisation de son public ( pas de kops bruyants imposant l’ambiance du début à la fin et conditionnant les spectateurs) ; le public  n’a pas recours aux trompettes, sirènes et autres vuvuzelas. La violence incarnée par l’affrontement de l’homme et de l’animal est présente dans le ruedo, elle capte l’attention de tous ainsi que le montre le récent court métrage « aparicion » de Meryl Fortunat-Rossi illustrant les réactions des gradins au retour de José Tomas. J’aurais aimé parler du respect mais la passion l’emportant parfois pour le meilleur et pour le pire les tristes sorties ce printemps sous les huées d’el Fundi à Arles et sous les coussins d’Aparicio à Madrid ne sont pas sans me rappeler les réactions primaires d’un supporter déçu par son équipe ou qui s’estime trompé par l’arbitre. Il reste que pour beaucoup de gens la corrida est un moment rare parce que peu retransmise, et, en conséquence le public très concentré ne se laisse pas distraire, le spectacle demeure sur le terrain.

Les aspects festifs et les excès sont ailleurs.

Au fait avez-vous déjà assisté à une corrida depuis l’extérieur de l’arène? C’est une expérience à vivre et au final le compte rendu que vous en ferez sera fidèle à la réalité vécue dans le ruedo comme quoi parmi les cinq sens l’écoute n’est pas inutile même s’il n’est pas celui qui vient immédiatement à l’esprit lorsque l’on déguste cet  art spectaculaire et émouvant par essence.

Dominique VALMARY



[1]Aficion – Ensemble des amateurs de courses de taureaux.

[2]Ruedo – Piste de forme le plus souvent circulaire sur laquelle se déroule l’action.

[3]Callejon –  Couloir circulaire délimité par la barrière de bois qui borde la piste et la contre-barrière au-dessus de laquelle s’élèvent les gradins. C’est dans ce couloir que séjournent les toreros quand ils ne sont pas en action sur la piste.

[4]Mundillo – Petit  monde qui regroupe tous les acteurs du spectacle taurin et la partie la plus avertie de ses amateurs.

[5]Tendidos – Gradins.

[6]Aplausos– Applaudissements.

[7]Pitos –  Sifflets.

[8]Diestro – Substantif dérivé de l’adjectif diestro habile pour désigner le matador.

[9]Toro – Dans le jargon taurin français,  le mot espagnol toro désigne un taureau de combat pour le distinguer  du taurau domestique. Pour être précis le locuteur espagnol dira : toro bravo.

[10] Arrastre – Action de faitre traîner par des mules la dépouille du taureau pour l’évacuer de l’arène.

[11]Lidia  – Combat.

[12]Apoderado – Agent, représentant, fondé de pouvoir, du torero.

[13]Lidiador– Torero.

[14]Brindis – Toast, offrande… Le maestro offre, dédie,  la mort de son taureau à l’assistance ou à une personne choisie dans l’assistance.

[15]Toreo– Manière de toréer qui inclue la technique et l’art.

[16] Toro soso– Taureau fade.

[17]Aplomado –Se dit du taureau qui devient moins mobile au cours du combat, comme s’il s’était alourdi.

[18] Entrar a matar– Littéralement  “entrer pour  tuer” ; c’est l’estocade.

[19] Voltereta – Culbute ; se dit quand le torero est pris et renversé par le taureau..

[20] Puntillero– Celui qui achève le taureau d’un coup de poignard dans la nuque pour sectionner le bulbe rachidien.

[21]Tercios – Tiers. Une corrida est composée de trois épisodes successifs ou trois tiers, les piques, les banderilles, la mort.

[22] Peña– Groupe associatif.

[23]Faena– Travail ; le travail du torero, sa prestation.

[24]Brega  – Lutte ; art du combat ; cape de brega, cape utilisée en piste lors du combat par opposition à la cape d’apparat richement décorée et brodée que les toreros arborent lors du défilé initial.

[25]Redondel – Synonyme de ruedo, piste.

[26]Paseillo – Défilé initial de tous les acteurs de la corrida en prélude aux combats proprement dits.

[27] Citer- L’espagnol citar signifie appeler, faire venir.

[28]Tremendisto – Qui fait peur, se dit des toreros qui prennent ostensiblement des risques pour provoquer l’émoi des spectateurs..